samedi, novembre 18, 2006

Voilà où ça nous mène, la folie des zobs

Aidez-moi: j'ai l'impression troublante que les deejays nous prennent pour des veaux. il m'est difficile de me souvenir de la dernière fois que je suis sorti en club pour aller voir un bon mix sans ressortir les oreilles défoncées, et de surcroît, un peu dégoûté par la sélection musicale, même de la part d'artistes que j'estime. et la mode récente consistant à faire saturer tous les synthétiseurs ne va pas arranger mon désarroi. Tout se passe, j'imagine, dans la tête des passeurs de disque, comme si, après une heure du matin, le public ne pouvait plus supporter des morceaux au bpm inférieur à 140, et comme si on perdait toute confiance dans la capacité d'un morceau à capter l'attention sans matraquage sonore. Les causes sont trop diverses pour être saisies ici, mais je vais proposer quelques pistes.
Premièrement, le monde des boîtes de nuit étant extrêmement concurrentiel, la qualité du spectacle proposé doit être basée sur l'intensité du "fun" que l'on tente de fournir au client. Les critères de cette intensité étant aussi flous qu'arbitraires, un primat est accordé aux manifestations les plus immédiatement perceptibles: cris, sauts, et autres signes supposés illustrer un sentiment d'abandon de soi. Quand l'on songe à tout ce que la présence dans ces lieux implique comme efforts, en terme de tenue vestimentaire, pouvoir financier, et investissement culturel minimal, au moins pour sélectionner la soirée et être en mesure de produire un discours sur l'offre musicale, ce pseudo-arrachement à soi-même me fait doucement rire. Cette remarque vaut surtout pour les boîtes à programmation spécifiquement électronique, phénomène cantonné aux grandes villes, et par conséquent majoritairement élitiste. Un deuxième champ de réflexion serait la peur du deejay d'être disqualifié pour cause de "linéarité". La nature essentiellement répétitive de la house et de la techno semble en effet se prêter facilement à ce type de reproche. Il est donc tentant de pratiquer une surenchère dans le volume et le rythme. c'est sans doute l'argument le plus simple, mais il me semble néanmoins assez juste. Pour finir, je voudrais esquisser une autre hypothèse; je n'ai aucun moyen d'en tester la réalité, mais si vous avez des témoignages pouvant étayer cette idée, je suis preneur. Voilà l'idée: il y a, à mon sens, un leadership masculin sur le monde de l'électro: la majorité des deejays est composée d'hommes et parmi les amateurs pointus, qui fréquentent les disquaires spécialisés, on trouve plus de garçons que de filles. J'ai toujours eu la sensation que la radicalisation progressive du son avait pour vocation de maintenir dans l'esprit du client un rapport de force entre un mâle dominant, fût-il au contrôle des platines ou accoudé au bar en train d'étaler sa science, et une clientèle féminine, supposée être coeur de cible (je pense à des arguments proches de ceux que Tiga avait proposés pour l'album de Mr. Oizo). C'est ma conviction intime: il y a une fiction perpétuée par beaucoup de deejays qui consiste à se poser en fournisseur d'énergie, à peine diminuée par la médiation des platines, pour maintenir une relation de domination. Tout contre-exemple est le bienvenu: citez moi un club dans lequel on ne ressent par cette inéluctable pression sonore monter passé minuit, et j'achète mon billet de train dans la foulée. Je rêve du club où à trois heures du matin, on écouterait ceci:

Jona - Tizia


Ce morceau n'est ni une nouveauté, ni une rareté. Il me tient néanmoins particulièrement à coeur. Sa construction est si irrésistible que cela laisse pantois, et me fait penser que ce jeune belge pourrait bien devenir le gros phénomène des prochaines années. Ce titre est extrait du maxi éponyme, qui constitue sa deuxième sortie sur le label Get Physical. Je pense que par rapport à ce label deux cas de figure sont envisageables: soit vous le connaissez et avez téléchargé le morceau avant même de lire ce texte, soit vous ne le connaissez pas encore, et, ma foi, vous vous exposez à de merveilleuses découvertes. On découvrira peut-être un jour que ce blog a été créé juste pour parler de tout ce qui touche à Booka Shade. En attendant, réécoutons ce Tizia à la production impeccable, tout en basses rondes et obsédantes, percussions digitales et synthés multi-traités par ordinateur. Jona déroule son thème initial sans jamais dévier de ce style imposé dès l'introduction; le cheminement est agrémenté de coupes aphex-twiniennes, d'anti-breaks (des moments de surcharge d'éléments parasites qui disparaissent soudainement pour laisser réapparaître le morceau), et de riffs de synthé tissant un réseau d'échos au thème central sans jamais tomber dans la guimauve. Allez sur Beatport acheter les autres perles de Jona (mention spéciale à son Tap Stroke EP sur Fumakilla).


je pourrais aussi complètement craquer et proposer un remix disco-house de Demis Roussos, mais ce n'est ni le moment ni le lieu.

bises

jojo

2 commentaires:

Anonyme a dit…

allez pete un coup, Jojo, ça ira mieux

menteur pervers a dit…

parfaitement d'accord, ce post pète.
même si le morceau "caché" fait un peu mal aux oreilles...
bises